En tant qu’investisseur, il faut non seulement faire preuve de discipline, mais aussi établir un plan de match que l’on s’efforcera de suivre rigoureusement. Un tel plan nous aidera à atteindre nos objectifs, tout en gardant la tête froide lorsque les émotions pourraient nous amener à commettre des erreurs. Petit guide des étapes à suivre et des embûches à éviter.
Qu’est-ce qu’un plan de match ?
Annamaria Testani, vice-présidente Ventes nationales chez Banque Nationale Investissements, le compare à une photo qu’un expert en planification financière pourrait prendre de notre situation, à un moment précis, afin de pouvoir prendre des décisions plus éclairées par la suite. « Cela s’apparente à un médecin qui ferait notre bilan de santé pour cerner un problème particulier. L’idée principale est d’analyser la situation de départ et de déterminer quel est le but recherché. Lorsqu’on n’a pas de plan, on ne réalise pas les erreurs que l’on fait et c’est plus difficile de les corriger », explique Mme Testani.
Outre une solide planification, l’experte recommande de baser sa stratégie sur l’investissement et l’épargne systématique. « Il n’existe pas de formule magique pour atteindre ses objectifs financiers. Comme les rendements passés ne sont pas garants des rendements futurs, il faut s’imposer une discipline qui sera payante à long terme. On ne doit pas s’attendre à une recette miracle qui produira des effets remarquables à court terme », dit-elle.
Un conseiller ou un planificateur financier peuvent vous aider à mettre sur pied ce fameux plan. « Je crois énormément à la valeur du conseil. Pour ma part, même si j’œuvre dans le domaine de la finance, je n’hésite pas à m’entourer d’experts pour m’aider à prendre les bonnes décisions », assure Mme Testani.
Prévenir l’impact des émotions
Parce qu’il nous incite à suivre une ligne directrice, un bon plan de match nous aide aussi à nous protéger… de nous-même ! En effet, bon nombre de mauvaises décisions financières sont prises par les investisseurs lorsqu’ils sont sous le coup de l’émotion : la crainte générée par un marché fragilisé et une correction boursière, ou au contraire, l’optimisme et l’excès de confiance, le refus de perdre et la prise de décision trop lente ou trop rapide sont autant d’interférences que peuvent causer les émotions en matière d’investissement.
En fait, la plupart d’entre nous éprouvent des difficultés à gérer les aspects psychologiques liés à la gestion de nos placements. L’analyse de la psychologie de l’investisseur a toutefois donné naissance à ce que l’on appelle aujourd’hui la finance comportementale, c’est-à-dire la façon dont les individus prennent des décisions financières et évaluent leurs perspectives de pertes et de gains.
À la fin des années 1970, deux chercheurs ont développé la théorie des perspectives (prospect theory). Selon les psychologues Daniel Kahneman et Amos Tversky, on adopte des comportements différents et irrationnels face aux perspectives de pertes et de gains. D’après cette théorie, les individus acceptent mal la contrariété provoquée par une perte financière en Bourse, et sont prêts à prendre des risques plus élevés et irraisonnés pour éviter celle-ci. Mais il y a plus : les chercheurs ont constaté que la perspective d’une perte financière n’est pas compensée par celle d’un gain similaire et que la perte crée une réaction émotionnelle plus importante qu’un gain équivalent.
Ainsi, une personne préférera habituellement faire un gain de 100 $ plutôt que de gagner 200 $ et d’en perdre 100 $, ce qui crée pourtant un bénéfice équivalent au bout du compte. Cette allergie à la perte peut générer chez l’investisseur une prise de risque inhabituelle : ainsi, il conservera plus longtemps un titre en baisse en espérant qu’il finisse par remonter, au lieu de limiter les pertes en le vendant immédiatement. Par ailleurs, face à un choix risqué conduisant à des gains, un investisseur sera prêt à accepter une solution produisant un rendement inférieur pourvu que cela soit plus sûr. Ainsi, un individu qui doit placer 1 000 $ préfère avoir 100 % de chance de gagner 500 $ que 50 % de recevoir 1 000 $ et 50 % de risque de ne faire aucun profit.
Temps et confiance
L’autre impact important des émotions sur les décisions des investisseurs concerne la confiance et le temps nécessaire à l’établir. Par exemple, lorsque le marché semble fragile et incertain, on aura tendance à cesser d’investir jusqu’à ce que notre confiance se soit rétablie, c’est-à-dire lorsque le marché sera résolument en hausse. On achètera alors des titres au moment où ils sont le plus cotés, et lorsqu’on entrera à nouveau dans un cycle baissier et que leur valeur diminuera, on finira par s’en départir… juste au moment où le cycle repart à la hausse ! Parce qu’il aura pris trop de temps avant de décider d’acheter, l’individu n’aura donc pas profité de tout le potentiel de gain que représentait l’achat de titres. Résultat : il effectue des placements à contre-courant des cycles économiques.
Être opportuniste et prendre trop de risques
L’autre élément que nous apprend la psychologie dans ce domaine, c’est qu’un investisseur, même s’il fait habituellement preuve de prudence, se montrera opportuniste et prendra davantage de risque parce qu’il espère faire un gain rapide sur des titres, puis les revendre. Ce faisant, il se place dans une position contraire à ses objectifs et considère la Bourse comme un casino. Or, les événements qui influent sur les perspectives de rendement d’un titre sont nombreux et imprévisibles, et notre investisseur risque fort de se tromper dans ses projections.
Des leçons que l’on aurait tout intérêt à méditer pour ne pas se laisser guider par ses émotions…